Le percussionniste (2022) est sélectionné dans le cadre de la deuxième édition du Prix littéraire Gonet qui récompense à Genève un ouvrage francophone en lien avec les enjeux sociétaux de notre temps.
Dans ce très beau récit de vie oscillant entre ombre et lumière, l’autrice et illustratrice suisse romande Evelyne Rivat Métrailler (1962) raconte son fils cadet et sa vie de mère d’un enfant polyhandicapé.
A travers une succession de petites anecdotes bouleversantes de sincérité, elle raconte le long et difficile voyage qu’elle entreprend avec son mari et ses trois fils aînés depuis que Virgile, ce bébé « hors normes », « ce nouveau-né qui ne ressemble à aucun autre enfant », est venu bousculer et bouleverser à tout jamais leur vie de famille en septembre 2001.
Elle évoque notamment l’incertitude et la fragilité des premières années de vie de ce petit garçon atteint d’une maladie génétique rare, les nombreux séjours à l’hôpital, le quotidien très lourd et la relation des grands-frères avec Virgile.
« Avancer avec lui, de jour comme de nuit, aveuglés par la lumière du soleil ou progressant à tâtons dans les ténèbres étouffantes. »
Malgré son dévouement et l’amour infini qu’elle porte à son « enfant soleil », son petit percussionniste qu’elle a accueilli dans sa vie comme une évidence, Evelyne Rivat Métraillier est consciente de la nécessité de prendre un peu de recul en s’octroyant de petits instants de liberté. Ces instants de liberté et de légèreté, elle en vivra, contre toute attente, par la suite précisément avec Virgile qui l’accompagnera régulièrement lors de petites virées à travers les quatre coins du pays.
Aux explications sur le quotidien se mêlent également des considérations sociales et des réflexions philosophiques. Evelyne Rivat Métrailler évoque ainsi notamment le regard que la société porte sur les familles et les enfants dits « spéciaux », pointe du doigt les insuffisances liées à leur intégration scolaire et sociale et s’interroge sur leur avenir ainsi que sur celui de leurs parents vieillissants.
« Nous vivons dans le tiers-monde de la communication et du partage. »
Elle déplore la peur de la différence et le désintérêt qui en découle, dénonce les reproches, le jugement permanent et le civisme exacerbé des bien-pensants et s’érige avec véhémence contre le mythe tyrannique de la mère parfaite. Elle regrette profondément « le manque total d’empathie, de fraîcheur dans les paroles, de simplicité dans les rencontres » et assène « A force de cadrer l’individu, de l’emballer sous cellophane, de le protéger des aléas de la vie et d’effacer les difficultés, il est empêché d’être, tout simplement. »
Malgré toute « la fureur du quotidien », la fréquence et la violence des tempêtes, cette mère qui se dit excessive, roule trop vite et parle trop, a su ne jamais perdre de vue la petite lumière qui brille au loin. Avec Le percussionniste, elle nous offre un témoignage résolument optimiste, une histoire de vie d’une profonde humanité et une très belle histoire d’amour entre une mère et un fils.
« Ce chemin de croix n’en est pas un. C’est plutôt un chemin de résilience et d’ouverture au monde, au vrai monde. »

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« Vous n’avez pas besoin d’être handicapé pour être différent, car nous sommes tous différents » (Daniel Tammet)
Quatrième lecture dans le cadre de l’année thématique « Autour du handicap » organisée par Eva, Patrice et Ingannmic.

Merci pour cette belle proposition, ce récit a l’air à la fois bouleversant et lumineux..
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C’est un magnifique témoignage, d’une honnêteté bouleversante. Une lecture nécessaire à mettre entre toutes les mains!
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Tu fais aussi partie du jury du prix Gonet ?!
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Oui, pour la deuxième année consécutive. Toi aussi?
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