Je vous écris de Téhéran · Delphine Minoui

Sous forme d’une longue lettre posthume à son grand-père iranien, la journaliste franco-iranienne Delphine Minoui nous raconte ses années à Téhéran, depuis son premier voyage en 1997 jusqu’à son départ définitif en 2009.

Notre liberté n’était pas un combat, c’était un mode de vie.

C’est le constat que fait Delphine Minoui lorsqu’elle rentre à Paris en 1998 après son premier séjour de quelques mois à Téhéran, où elle s’était rendue pour réaliser un reportage sur la jeunesse iranienne, une jeunesse assoiffée de liberté et parfaitement rompue à l’art de la transgression. Atteinte du syndrome de « l’iranite », elle va très rapidement vouloir retourner en Iran pour s’y installer durablement et surtout pour comprendre de l’intérieur ce pays dont elle tient une partie de ses racines et qu’elle aime déjà profondément mais qu’elle ne connaît finalement que très peu.

Avec beaucoup d’enthousiasme et d’espoir, elle décortique les changements naissant avec le renouveau politique suite à l’avènement du président Khatami en 1997 et aux premières élections municipales de la république islamique en 1999 qui ont confirmé et porté au pouvoir les réformateurs. Mais ce climat de détente politique, caractérisé notamment par la liberté d’expression et la tolérance, est malheureusement de courte durée.

Bien que les législatives en 2000 aient été également remportées par les réformateurs, la réponse des conservateurs est redoutable et Téhéran sombre rapidement dans le chaos. Les émeutes étudiantes sont nombreuses, la répression est féroce: les étudiants sont muselés, les religieux modérés et les dissidents incarcérés, les intellectuels assassinés.

Face à ce déchaînement de violences, l’enthousiasme et l’optimisme de la journaliste flanchent, laissant la place au doute et à la crainte. Le climat politique et sa situation personnelle deviennent de plus en plus difficiles mais elle refuse encore et tjrs de quitter l’Iran, tiraillée entre son immense amour pour ce pays et la peur qui va crescendo. Car elle est surveillée de très près. Avec l’arrivée au pouvoir du président Ahmadinejad, la situation devient très critique et elle quittera finalement l’Iran définitivement en 2009.

S’il décrypte de façon très précise certains aspects de la problématique iranienne, ce témoignage se lit comme un roman. Grace à son immersion dans le pays et à son histoire personnelle, Delphine Minoui montre un autre visage de ce pays diabolisé par l’Occident depuis des décennies. C’est un récit poignant, intéressant et instructif. Je vous le recommande chaleureusement!

Points, 360 pages, mars 2016.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s