Maudits est le premier roman gothique que je lis de Joyce Carol Oates. S’il est moins intense émotionnellement que Fille noire, fille blanche ou Daddy Love que j’ai lus l’année dernière, il est très riche intellectuellement et pas de tout repos non plus! Imposant par sa longueur (800 pages), sa structure narrative et son mélange de styles et d’ambiances, c’est un roman étrange et parfois un peu ardu mais tellement envoûtant!
En mélangeant de façon très habile des faits historiques et des événements surnaturels, des personnages fictifs et des figures réelles (présidents des États-Unis, écrivain, militant socialiste), JCO brosse un portrait sans concession de la « bonne » société princetonienne du début du XXème siècle.
Maudits se présente sous une forme narrative particulière puisqu’il s’agit une chronique dans laquelle son auteur (le narrateur) -un historien un brin énervant- s’adresse régulièrement au lecteur. Ses disgressions (divagations) sont nombreuses mais il tente tant bien que mal et à grand renfort de notes de bas de pages, d’extraits d’un journal codé, de faire toute la lumière sur la Malédiction qui a frappé Princeton, dans le New Jersey, entre 1905 et 1906.
JCO se sert de cette malédiction pour émettre une critique virulente de la société de l’époque, hypocrite et moralisatrice. S’appuyant sur de nombreuses références sociales, culturelles, religieuses et politiques, elle dénonce, impitoyable, l’oppression: celle des noirs, des femmes, des pauvres. Elle aborde le lynchage des noirs, le combat des suffragettes, la lutte des classes et tire à boulets rouges sur le racisme, la misogynie, le puritanisme et le capitalisme. Un régal!
Pour conclure: lecture pas toujours aisée mais très intéressante, qui incite à la réflexion et à l’approfondissement de certains thèmes. J’en redemande.
