Qaanaaq · Mo Malø

Il est des romans qui vous happent dès les premières pages et dans lesquels vous vous sentez si bien que vous ne souhaitez qu’une chose: ne jamais les terminer! Parce qu’une fois la dernière page tournée, il ne reste qu’un immense vide, une déprime littéraire et, dans ce cas précis, une furieuse envie de décoller pour le Groenland et ses immensités sauvages et glacées!

Parce que Qaanaaq de Mo Malø est bien davantage qu’un simple roman policier, c’est aussi et surtout un très beau voyage aux confins d’un immense territoire méconnu et agrémenté de considérations historiques, économiques et politiques absolument passionnantes! Enfin, c’est une rencontre des plus fascinantes avec une culture et des croyances ancestrales.

Après 42 ans d’absence, le capitaine danois Qaanaaq Adriensen retourne dans son Groenland natal qu’il a été contraint de quitter à l’âge de 3 ans. Dépêché à Nuuk par la Crim’ de Copenhague, il est chargé d’élucider les meurtres de trois, puis quatre, employés d’une compagnie pétrolière, retrouvés sauvagement égorgés puis éviscérés à la manière des ours polaires. À ces meurtres s’ajouteront bien vite ceux de deux chasseurs d’ours et de phoques à Thule, un coin perdu situé dans le Grand Nord, à 1600 km de Nuuk.

Avec Qaanaaq, Mo Malø signe un polar magistral dans lequel enquête rime avec découverte et apprentissage. Il nous raconte ainsi un pays, de sa topographie à ses enjeux électoraux et à son vote pour l’Indépendance, en passant par les Jeux Arctiques et la chasse aux phoques. Il nous parle magouilles politiciennes et volonté de s’affranchir de la tutelle danoise, met en exergue d’importants enjeux économiques et politiques liés à l’exploitation des ressources naturelles et dénonce les dérives et les désastres écologiques résultant d’un développement énergétique irresponsable. Il évoque aussi la guerre froide, les bases américaines et l’abberation de Camp Century, fait références aux expéditions polaires et nous raconte la culture originelle et le nationalisme inuit.

Côté personnages, nous avons notamment des nationalistes, des indépendantistes, des extrémistes, des businessmen prêts à tout, des politicards véreux ou encore une directrice des forces de police groenlandaise transformée en harpie autoritaire et un chef de village du Grand Nord faisant office de policier, facteur et coach sportif… Et puis nous avons Qaanaaq Adriensen et son adjoint inuit au Groenland, Apputiku Kalakek. Tous les deux à la croisée de deux mondes. L’un, allergique à toute autorité et ne supportant que l’imperfection, connait par cœur des dizaines de proverbes qu’il sème à tout vent tout en étant incapable de prononcer son prénom correctement. Son séjour au Groenland lui permettra de se reconnecter avec son histoire et ses racines. L’autre, accro aux polars, évolue entre tradition et modernité, entre son ragoût de phoque immangeable et son ordinateur high-tech.

Comme j’ai aimé ces personnages, cette intrigue, cette ambiance! L’écriture et le ton. Le fait de partir à la découverte de Nuuk et de ses environs, du Grand Nord plongé dans la nuit polaire et de l’Inlandsis, ce no-man’s land infini et gelé totalement vide et hostile…

Vous l’avez compris: c’est un sans faute et un IMMENSE coup de cœur! 

La Martinière, 496 pages, mai 2018.


Crédit photo ©pixabay

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